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À Aix, la pistache veut se tailler une place au soleil


Rédigé par Grégoire Sévrin le Lundi 30 Juin 2025 à 22:03 - 0 Commentaires

Agriculture – Après l’amande, Olivier Baussan, fondateur de L’Occitane, parie sur la pistache provençale. Il vient d’ouvrir à Aix une « Maison de la Pistache », vitrine d’un ambitieux projet agricole, économique et culturel.


Dans une petite rue du centre d’Aix-en-Provence, une boutique flambant neuve attire les regards avec ses étals colorés de pistaches du monde entier. Bienvenue à la Maison de la pistache, troisième du nom après Valensole et Oslo, née sous l’impulsion d’Olivier Baussan, le serial entrepreneur à qui l’on doit déjà L’Occitane, Oliviers & Co ou encore la Confiserie du Roy René.

À 73 ans, l’infatigable promoteur de l’art de vivre provençal s’est trouvé une nouvelle mission : relancer la culture de la pistache en Provence, comme il l’a fait avec l’amande. Objectif affiché : conquérir le marché haut de gamme en misant sur la marque « Provence », et décrocher à terme une Appellation d’Origine Protégée (AOP).
« Il faut viser le haut de gamme. C’est l’image qui fait la différence, pas le prix au kilo », martèle Olivier Baussan. « On ne sera jamais compétitifs face aux États-Unis ou à l’Espagne. Ce qu’on vend, c’est un territoire, une histoire, un goût. »

Une agriculture d’image, pas de masse

Comme pour l’huile d’olive ou les calissons, le secret du modèle économique n’est pas dans le volume, mais dans la valeur ajoutée. Une stratégie assumée par celui qui ne croit guère aux solutions protectionnistes proposées par d’autres figures de la filière amande, comme Arnaud Montebourg :
« Même avec 50% de taxes, l’amande américaine sera toujours moins chère. La seule vraie réponse, c’est l’image. »
Le projet pistachier d’Olivier Baussan repose sur une franchise de boutiques, une montée en gamme des produits, et l’espoir d’une labellisation qui ouvrirait la porte à des prix élevés : « La pistache de Bronte, en Sicile, se vend 180 euros le kilo. On peut rêver grand ! »

Une culture prometteuse en contexte climatique

Plus qu’un coup marketing, la pistache représente aussi une réponse aux défis agricoles du Sud-Est : sols secs, sécheresses récurrentes, gelées printanières. Sur les hauteurs du Luberon, à Ansouis, Cucuron ou Lauris, les pionniers de cette culture y voient une voie d’avenir.

Fabien et Emilie Fiorito, jeunes agriculteurs à la tête de deux hectares de pistachiers, ont fait le pari dès 2020.
« On cherchait une culture qui sorte de l’ordinaire, et qui permette de concilier vie professionnelle et personnelle. La pistache demande peu d’eau, peu d’entretien, et résiste mieux aux gelées que l’amande », explique Emilie.

Le couple attend sa première vraie récolte pour 2025.
Même constat chez Aurélien Tellier, viticulteur à Lauris : « J’ai des terrains trop secs pour la vigne. J’ai planté deux variétés de pistaches sur deux hectares. Ma première récolte en 2024 ? Quinze kilos. Mais c’est un début. Je vise 800 kilos à l’hectare, à 30-35 euros le kilo, si le produit est bien valorisé. »

Une filière encore embryonnaire

À ce jour, la France ne compte que quelques dizaines d’hectares de pistachiers. Mais les ambitions sont grandes : 3 000 hectares visés d’ici 2035, avec l’Occitanie comme relais prometteur. L’association Pistache en Provence et le jeune syndicat France Pistache multiplient les actions de structuration de la filière.

En attendant, les Maisons de la pistache s’installent dans les grandes villes — Lyon, Paris, Oslo — pour éduquer les consommateurs aux « grands crus » de pistaches mondiales, de la Grèce à l’Iran en passant par la Sicile.

« C’est une culture ancienne, noble, portée par de petits producteurs, loin des modèles intensifs. C’est ce qu’on veut valoriser », souligne Olivier Baussan.


Les chiffres clés de la pistache en Provence :

  • 3 boutiques ouvertes (Valensole, Aix, Oslo) ; 5 prévues en 2025
  • 30 à 35 € le kilo espérés pour la pistache française haut de gamme
  • 3 000 hectares de plantations visés à l’horizon 2035
  • 500 000 € de chiffre d'affaires annuel visé par boutique

Olivier Baussan, le parfumeur de la terre

Olivier Baussan / Photo FaceBook / DR
Olivier Baussan / Photo FaceBook / DR
À 73 ans, le fondateur de L’Occitane continue de cultiver la Provence – cette fois avec des pistaches.

Quand il parle de lavande, d’huile d’olive ou de pistache, Olivier Baussan n’évoque jamais seulement une culture. Il parle de paysages, d’héritage, de poésie. Depuis près de cinquante ans, cet amoureux de la Provence s’est fait une spécialité : transformer des traditions locales en emblèmes internationaux du "bien-vivre" à la française.

C’est en 1976 qu’il fonde L’Occitane, marque désormais mondialement connue pour ses cosmétiques aux senteurs méditerranéennes. Suivront les huiles d’Oliviers & Co, les produits d’épicerie fine Brémond 1830, puis les douceurs de la Confiserie du Roy René. À chaque fois, une même recette : du terroir, du sens, et une touche de storytelling.

« Ce n’est pas du luxe, c’est du raffinement simple », aime-t-il rappeler. Une philosophie qu’il applique aujourd’hui à ses nouvelles obsessions : l’amande, puis la pistache. Avec Territoire de Provence, son groupe agricole, il investit dans la relance de cultures méditerranéennes oubliées, avec l’ambition de leur rendre une valeur patrimoniale et commerciale.

Son nouveau combat ? Obtenir une Appellation d’Origine Protégée pour la pistache française. Et dans son sillage, il embarque agriculteurs, commerçants et consommateurs, à coups de Maisons de la Pistache qui fleurissent aux quatre coins de l’Europe.

Écologiste convaincu, entrepreneur tenace, esthète discret, Olivier Baussan incarne cette Provence enracinée et voyageuse, qui sent bon le soleil, les pierres chaudes et les rêves un peu fous.

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